Léopold Barbier (arbitre) : « Un sentiment d’insécurité de plus en plus grand »
Arbitre en Régional 3 depuis 2017 et président de l’UNAF 54 (association qui fédère et accompagne plus de 14.000 arbitres en France), Léopold Barbier évoque l’inquiétude grandissante des hommes au sifflet face à la flambée d’incidents sur les terrains
Léopold Barbier, avez-vous, vous-même, constaté une détérioration du climat sur et en dehors du terrain depuis le début de saison ?
Oui, je l’ai constaté. En tant qu’arbitre mais aussi comme passionné car j’assiste à beaucoup de matches en spectateur. Depuis la fin du Covid, les comportements sont de plus en plus débridés et les faits de plus en plus graves. Souvent, les supporters en sont à l’origine car ils enveniment les choses.
C’est un phénomène nouveau…
Oui et comme nous sommes au niveau amateur, il n’y a pas de tribune ou de dispositif de sécurité, comme les chez pros, pour créer un rempart. Un geste ou un chambrage de spectateur peut faire dégénérer un match. Du coup, les arbitres nourrissent un sentiment d’insécurité de plus en plus en grand.
Avez-vous été confronté à un fait de violence de cette nature cette saison ?
Non pas cette saison, mais il y a quelques années. À l’époque, j’avais eu de la chance d’être bien accompagné. L’arbitre est au cœur du jeu. Il tente de faire de son mieux. Quand ça nous arrive, c’est un tremblement de terre. On se remet profondément en question. C’est très déstabilisant. Car nous sommes des partenaires du jeu. Nous ne sommes pas là pour brider.
Êtes-vous inquiet ?
Oui. Il y a une gradation dans les comportements des joueurs et des supporters. Plusieurs fois cette saison, des arbitres nous ont relaté des hurlements de joueurs et d’entraîneurs qui viennent frapper dans la porte de leurs vestiaires, parfois jusqu’à la défoncer. On se dit que la prochaine fois, ce sera l’arbitre qui prendra les coups. Avec les matches à enjeu de fin de saison, la pression va encore s’accentuer. Il y a la crainte d’un incident encore plus grave.
La conséquence de cette violence, c’est que le nombre d’arbitres fond à vue d’œil…
C’est compliqué de fidéliser. Une bonne partie des nouveaux venus ne vont pas au bout de la première saison. Récemment, une jeune arbitre récemment promue qui officiait dans un match de jeunes, a assisté à une bagarre générale. Cela peut dégoûter du foot. Il faut avoir le cuir épais.